Il leur reste encore un peu de temps, un petit peu de temps...
En politique, il est important de savoir reconnaître ses erreurs. On peut se croire un grand stratège, seuls les faits disent
la vérité. On peut élaborer bien des plans, il n' y a aucune méthode qui puisse garantir le succès d'un seul homme et cela est d'autant plus vrai que l'exigence contemporaine et
universelle est le partage du pouvoir, la négation de toute autocratie ou de ses formes dérivées si courantes dans tous les systèmes étatiques non autogestionnaires.
En général d'ailleurs les politiciens parce qu'ils n'ont qu'une idée très restreinte de la démocratie sont persuadés que leurs idées sont celles qui permettront de changer le monde ou plus
exactement d'adapter le monde à leur volonté, de le modeler à leur désir. Ils sont persuadés, guidés par leur orgueil, qu'il suffit de conquérir le pouvoir pour que le monde se plie à leurs
exigences. Ils font preuve d'une lamentable cécité, d'une désespérante ignorance. En s'enfermant dans leurs systèmes de pensée, dans leur logique à trois francs six
sous, ils bannissent tout esprit scientifique, négligent l'effort théorique d'analyse du réel préférant de loin les idéologies qui les confortent dans leur
autosatisfaction; les principes du monde, ils sont persuadés que c'est leur cerveau qui les a créés, faisant preuve d'un vide philosophique irrémédiable.
Le monde politique, hélas, fourmille de ces dirigeants au maigre talent, qui n'auront jamais l'intelligence de reconnaître leurs erreurs et surtout qui
enflés de leur suffisance ne peuvent imaginer un seul instant que d'autres puissent ouvrir des horizons nouveaux. Parfois saisis par l'angoisse de ce que le peuple
peut engager, pressentant leur pouvoir vasciller, ils imposent leur droit, cousu à leur mesure, n'écoutent même plus leur entourage et se plongent dans la spirale du
mépris, du rejet des autres, de l'insulte, voire de la répression et de la violence. Alors le pouvoir devient plus dur, voire plus féroce, efficace dans le commandement
autoritaire et dans la couardise, il conduit le dirigeant à mentir et à pousser les siens au mensonge direct, ou par omission, il transforme ses adversaires
en ennemis, et ses alliés en traîtres potentiels, il ne fait que reproduire les rapports de force séculaire du pouvoir dans une société de classes.
Misérable dirigeant, que sais-tu diriger ? On attendait de toi que tu ouvres des voies, on t'a donné ta chance et tu as cru qu'il suffisait d'accomplir ton rêve de puissance pour que
le monde te reconnaisse dans cette gloire dérisoire et pour l'éternité. Tu as pensé qu'en méprisant les plus faibles, en insultant ceux qui n'ont pas de titre mais qui ont
expériences et sagesse, que ton pouvoir perdurerait ? Tu es le pur produit d'appareils qui sont à la solde de la domination de classe, qui t'ont fait croire que la conquête
électorale pourrait t'émanciper des contingences du capital par le simple fait qu'élu tu scandais des idéaux républicains depuis longtemps foulés aux pieds par tes pairs. Certains t'ont
tendu la main et tu as cru qu'elle allait te poignarder, tu n'as pas su saisir l'occasion de devenir le dirigeant qui humblement serait au service de grands desseins, de ceux qui t'ont
toujours parus utopiques et que tu as rejetés à tout jamais.
Peut-être que le mouvement populaire te contraindra à faire machine arrière, peut-être même, sous l'influence des masses en action en viendras-tu à reconnaître tes trahisons
successives, mais on n'efface pas l'histoire. Et celle-ci par moment s'accélère, fait des bonds. On est chacun comptable de ses actes. Tant pis pour toi, l'histoire ne
t'appartient plus, il est trop tard.Trop tard pour toi, trop tard pour beaucoup de tes semblables. Une ère nouvelle s'annonce, elle sera le fruit de grands combats, le fruit d'une oeuvre
collective qui dépassera les pâles ambitions de ta triste caste de dirigeants sourds aux mouvements profonds de la société. Toi et les tiens , demeurerez
esclaves du passé.