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Politique, culture, éducation, formation pour la vie démocratique - blog créé le 10 mai 2006

Transports publics dans l'agglomération de Creil


 
Réflexions et propositions pour nos transports publics 
Les partisans de la délégation de service public en vue du marché  des transports urbains de l'agglomération creilloise dont le contrat avec Kéolis arrive à terme, présentent comme argument qu'une régie publique des transports, qu' une société publique locale, nécessiteraient des montages compliqués qui  coûteraient plus cher aux contribuables.
Soyons  pragmatiques. Il faut d'abord définir l'objectif que nous souhaitons atteindre avant d'énumérer les conditions  pour y parvenir. Pourquoi développer un service public de transports urbains, dans quels buts ? Nous pourrions résumer la réponse ainsi : il nous faut développer un réseau de transport public qui couvre toute l'agglomération  avec comme perspective des liaisons futures avec les territoires voisins afin de favoriser la mobilité des habitants, de réduire l'utilisation des véhicules particuliers, d'augmenter la capacité de déplacement de ceux qui n'ont pas de véhicules notamment  pour le trajet domicile- travail, pour se rendre sur les lieux de commerce et de loisirs, pour faciliter la mobilité des personnes en recherche d'emploi. Quelles sont les conditions pour parvenir à augmenter sensiblement le nombre de voyageurs et la qualité du service ? 
 
La  qualité du service dépend pour beaucoup de la qualité du matériel et de son entretien comme celui de la voirie et du professionnalisme des agents. Arrêtons -nous sur ce point : il est incontestable qu'une régie ou une société publique locale qui sont toutes deux contrôlées par la puissance publique, sans aucun intérêt privé en jeu,  doivent accorder plus d'attention aux conditions de travail, à la formation du personnel, aux droits des salariés qu'une société privée. Je ne citerai pas ici les exemples de conflits où les grandes sociétés privées de transport ont été condamnés pour non respect du droit du travail, ou encore les négligences avérées concernant la formation et la sécurité des personnels, la liste est longue. A ce propos il serait intéressant de connaître exactement l'état des statuts et des formations des  personnels administratifs, chauffeurs, contrôleurs et médiateurs à ce jour au STAC  ?
Quelles garanties vont disposer ces personnels si demain la CAC choisit de déléguer son service de transport à l'une des multinationales qui postule ? Seront-ils tous repris ? Les médiateurrs seront-ils intégrés dans la nouvelle structure ? Quels seront les statuts des uns et des autres ?
 
La régie publique,  la SPL,  devraient donner davantage de garanties aux salariés qui assurent le service des transports tout simplement parce qu'ils seront dans une structure dépendant directement des élus qui sont tenus de rendre des comptes et d'assurer une gestion transparente sans qu'interviennent  des critères de rentabilité privée. Il ne s'agit pas de rentabiliser des capitaux, il s'agit de rendre un service, la philosophie n'est pas la même et dans ce cas, le management des personnels est totalement différent. Il ne s'agit plus de pressurer les agents, de rogner sur leurs droits, d'économiser sur leurs formations et leurs rémunérations. Au contraire, il s'agit de privilégier un esprit d'équipe au service de la collectivité et donc de former les agents à l'esprit de service public, ce qu'aucun grand groupe privé ne sait faire puisque ce n'est absolument pas son rôle. L'objectif premier de ces groupes est d'assurer chaque année une augmentation sensible  des dividendes des actionnaires, qui oserait affirmer le contraire ? Or à orienter principalement  l'économie des entreprises sur ce critère, on constate les dégâts que cela entraîne en terme de destructions sociales, du droit du travail , des salaires, de l'emploi. La spirale de la course au profit intégrée dans celle de la spéculation alimente toujours plus la crise et ce sont les populations qui en définitve en paient le prix. Que ferons-nous si demain un grand groupe devenant délégataire et ayant spéculé sur des fonds de pension voit sa mise fondre au soleil et se retourner vers nous pour augmenter les tarifs des transports  ? La population ne demandera pas des comptes à ce délégataire mais aux élus qui auront pris la responsabilité d'engager cette délégation.
 
Deuxième condition : l'accès pour le plus grand nombre. Dans nos communes des centaines de  familles n'ont pas de véhicule ou n'en possède qu'un seul et  quand celui-ci est utilisé par un membre de la famille pour aller au travail, il ne peut l'être pour les déplacements du reste de la famille. Les nuisances de la circulation automobile sont évidentes : ralentissements et bouchons, pollution, multiplication des risques d'accidents, problèmes récurrents de stationnement. Un urbanisme de notre époque doit être conçu pour favoriser l'activité et donc les déplacements. L'agglomération creilloise présente une caractérisitique urbaine essentielle : l'existence de sa rivière. C'est en particulier pour la ville de Creil, une contrainte incontournable, il faut pouvoir la franchir. Imaginons qu'au lieu de prendre leur véhicule particulier, 40 conducteurs décident de prendre le bus : c'est une file de 40 véhicules  en moins dans nos rues, moins de nuisances, moins de stress, plus de fluidité de circulation. Evidemment pour convaincre nos 40 conducteurs de prendre le bus, les arguments écologiques ne pèsent pas lourds. Ce sont des arguments économiques qui peuvent les décider. La gratuité est la solution.
 
Pour résumer nous avons défini l'objectif et poser deux conditions pour l'atteindre: la qualité du service et la gratuité.
 
 
Mais....car il y a un mais.... J'entends d'ici déjà les remarques de ceux pour qui la gratuité n'est  pas très réaliste vu les ressources  dont dispose la CAC. C'est vrai la CAC n'est pas riche, la population est l'une des plus pauvres de France. Et c'est bien pour cela que la gratuité est une solution. Si les gens avaient les moyens le problème de la gratuité ne se poserait pas. Or l'on sait que sur les réseaux où la gratuité existe non seulement les plus démunis peuvent enfin se déplacer mais qu'il il y a eu un afflux important de toute la population dans sa diversité qui emprunte le transport collectif. Soit dit en passant c'est quand même pas mal en terme de sociabilité et de mixité que les gens se retrouvent ensemble dans un bus plutôt que tous seuls dans leur voiture. Autre constatation  : quand le transport est gratuit, les sources des conflits se réduisent, les agents se sentent plus en sécurité, l'ambiance est meilleure. Imaginons un transport gratuit avec une équipe de médiateurs-animateurs sur tout le réseau. des médiateurs formés pour renseigner les voyageurs, les aider à accéder au bus (personnes handicapées, mamans avec les poussettes, ...),  les informer des loisirs et manifestations dans l'agglomération : un bus qui deviendrait un vrai lieu de rencontre et de sociabilité dans un esprit de service public de grande qualité. Il y a quelques années une troupe de théâtre avait utilisé un bus à Montataire pour monter un spectacle vivant avec la population, c'est un exemple certes atypique mais qui montre combien le bus est un lieu qui peut être investi en terme de sociabilité et d'échanges. Puisque le transport est gratuit, vous n'avez plus besoin de contrôleurs et de nouvelles missions peuvent leur être assignée : promotion du service dans les quartiers et les entreprises, renseignements à la population, préparation et accompagnement des sorties scolaires.
 
Mais...mais vous ne répondez pas à la question du gestionnaire des deniers publics, cher monsieur ? Ca coûte tout cela, vous êtes bien gentil, mais rien n'est gratuit ! Evidemment dans une société comme la nôtre, rien n'est gratuit, tout devient une marchandise.  Mais pourquoi toujours prendre les problèmes dans un seul sens, pourquoi réfléchir en fonction de l'argent et non en fonction des besoins et de leur développement en atouts positifs pour la collectivité ? Quand vous aidez votre grand-mère à faire ses courses, vous ne lui facturez pas votre service quand même ? Alors pourquoi ce qu'un individu peut faire à son échelle, une collectivité ne pourrait pas le faire à la sienne ? N'est -ce pas une question de solidarité ?
 
Il est vrai que les budgets des collectivités sont mis en difficulté par la crise capitaliste qui pour une part consiste  à vider les caisses publiques pour remplir les caisses privées du grand capital. Nous arrivons justement à la rupture, au point crucial, au paroxysme de la logique du système. Les collectivités sous la menace des politiques libérales vont être de plus en plus contraintes soit de réduire leurs services, soit d'augmenter sensiblement les impôts, soit les deux ce qui va devenir intenable et ingérable pour les élus. Si les élus continuent de s'inscrire dans ce modèle économique ils prendront une lourde responsabilité et prennent le risque d'une immense colère populaire. Or nous n'avons pas été mandaté par les firmes capitalistes,  ni par les banques, ni par M. Sarkozy, mais par les habitants à qui nous avons des comptes à rendre et pour lesquels nous nous sommes engagés à améliorer leur quotidien. Il faut donc faire de la gratuité des transports un objectif politique répondant à un besoin populaire. C'est dire quil faut intégrer cet objectif dans la préparation  budgétaire et en faire un grand thème de mobilisation des habitants pour que soit augmentée la contribution transport des entreprises et que l'on obtienne une subvention d'Etat  exceptionnelle dans le cadre du CUCS  puisque c'est sa vocation (Le contrat urbain de cohésion sociale est un contrat passé entre l’Etat et les collectivités territoriales qui engage chacun des partenaires à mettre en œuvre des actions concertées pour améliorer la vie quotidienne des habitants dans les quartiers connaissant des difficultés (chômage, violence, logement...). Il est élaboré à l'initiative conjointe du maire, ou du président de l'EPCI, et du préfet de département.)
 
Imaginons que tout le Conseil communautaire  se prononce en ce sens : voilà ce qui  pour les citoyens donnerait du sens   au fait que nous soyons devenus une communauté d'agglomération.
Des élections cantonales vont avoir lieu. Les transports urbains feront sans doute partie du débat et il faut espérer que les candidats ne l'esquivent pas. Il est possible que certains reprennent tout ou partie des arguments que je développe ici. Je ne m'en plaindrai pas si c'est le cas. Mais je mets en garde les citoyens, jugez sur les faits et non sur les promesses, comptez d'abord et toujours sur votre propre action et intervention, c'est cela qui pèsera et qui comptera davantage que toutes les déclarations et les tractations politiciennes de droite ou de gauche qui au contraire ont conduit aux échecs que l'on connait et à la domination des forces de l'argent sur notre société.
 
L'efficacité c'est l'action unitaire et consciente des gens en dehors des manipulations politiques, ce n'est pas la délégation de pouvoir sans suite et sans contrôle citoyen, ce n'est pas de donner un mandat à un ou des élus qui intégrés dans le système oublient vite leurs engagements et deviennent des gestionnaires de l'ordre capitaliste sans jamais le  remettre en cause par des actes concrets et sans jamais créer les conditions d'une intervention permanente des citoyens sur les institutions que ces élus dirigent, ce n'est pas s'en remettre aux seuls compétences de spécialistes qui pour utiles qu'elles soient n'ont pas de légitimité de fait. Certains de ces élus qui sont obnubilés par leur pouvoir et l'ambition de le conserver, oublient un peu vite qu'ils ont des comptes à rendre aux gens, et pour certains que notre République toute imparfaite qu'elle soit, a imposé grâce aux luttes populaires des lois qui  leur interdisent  de confondre leurs intérêts privés ou partisans avec ceux de l'intérêt général.
 
Il faut savoir oser. Les citoyens attendent de leurs élus des initiatives qui les aident à mieux vivre et non la sempiternelle  justification à la gestion d'accompagnement du capitalisme du "On ne peut pas faire, on n'a pas les moyens, c'est la faute à la crise !" La politique serait-elle devenue l'art de l'impuissance et de la fatalité ? Il s'agit au contraire d'engager un combat. Il s'agit de s'engager en faveur d'une grande initiative politique et populaire : la gratuité d'un service public de transport urbain de qualité dans l'agglomération creilloise.
 
Jean-Paul Legrand
Maire-adjoint de Creil
Conseiller communautaire
Militant communiste de "Colère et Espoir"
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