Je pense qu'il faut révolutionner la gauche de fond en comble car elle est trop éloignée du peuple, elle a produit des dirigeants qui sont plus souvent préoccupés par leurs
postes que par l'intérêt des populations. Ces dirigeants ont une pratique tellement opposée à la recherche d'une vraie démocratie qu'ils conduisent les gens à se décourager, à les enfermer
dans des schémas de pensée qui visent à reproduire les rapports de domination de l'ordre en place. Quand on voit comment malgré les appels désespérés de tant de
gens, des élus ne passent même pas 10% de leur temps dans les quartiers populaires, voire n'y vont jamais parce que c'est dur de mettre les mains dans le cambouis, on comprend la crise dans
laquelle se retrouve la gauche.
Le capitalisme n'est pas seulement un système économique, il est également un système idéologique qui, pour exercer sa coercition sur les gens qu'il exploite, utilise tout l'appareil
'Etat. C'est pour cela que les élus du peuple peuvent vite être corruptibles, pas forcément avec de l'argent mais souvent idéologiquement car pris dans la spirale des obligations
de la bureaucratie ils oublient qu'ils ne sont que l'émanation souveraine du peuple, qu'ils doivent lui rendre des comptes. Combien de maire, d'élus, de conseillers généraux, de députés
rendent régulièrement compte de leur mandat ? Et cela n'est pas suffisant, car la question de fond est surtout combien décident réellement avec le peuple ? Que font-ils pour favoriser les décisons
collectives, associer les citoyens aux réalisations et à leurs évaluations ? Il est dans l'ordre naturel du capitalisme que les élus de droite se contrefichent de décider avec les gens
et en particulier avec les plus exploités, pour eux l'Etat, les collectivités doivent se gérer comme des entreprises capitalistes. Mais lorsque cela vient des élus de gauche, il y a alors une
contradiction avec la nature même de la gauche et de ses valeurs.
Je pense qu'il faut révolutionner la gauche tout simplement parce que bon nombre de ses dirigeants n'écoutent plus les exploités ou font semblant avec souvent beaucoup de condescendance. Ils
ont enterré le mot "révolution", ils ont jeté le marxisme aux oubliettes, ils ont décrété que l'industrie c'était fini, ils chaussent les lunettes de la droite et du consensus mou pour voir le
monde, ils parlent de mondialisation comme d'une nouveauté dont la fatalité capitaliste serait écrite d'avance sans n'avoir jamais lu les pages éclairantes de Marx sur la question qui démontrent le
caractère révolutionnaire de cette mondialisation des forces productives, ils adoptent comme des fétiches les pires niaiseries idéologiques de soit disants intellectuels qui ressassent
que le capitalisme est indépassable, que ce serait la fin de l'histoire et j'en passe...Et c'est dans cette logique d'abandon de toute pensée critique qu'ils en viennent aux combinaisons les plus
dangereuses en rejoignant la droite ou en s'alliant avec le Modem, qui est un parti de droite.
Bref il y a belle lurette qu'ils ont abandonné la lutte de classes pour leur petit pouvoir, car ces gens là sont de petits messieurs qui braillent dans le désert de leur pensée dès qu'ils
sentent que les prolétaires pourraient commencer à bousculer les choses, qu'ils pourraient s'emparer des idées révolutionnaires en gestation dans le mouvement réel de la société : celles de
la coopération, celles d'une utilisation démocratique de l'argent, celles de l'auto-gestion des entreprises, celles du partage des pouvoirs et des savoirs.
Imaginez une gauche avec de nouveaux dirigeants dont la principale activité serait de tout mettre en oeuvre pour redonner confiance aux gens dans leur capacité d'inventer, d'intervenir,
de construire des solutions inédites et transformatrices. De développer dans chaque ville, chaque village, chaque quartier, chaque entreprise, des rapports nouveaux au pouvoir de telle sorte
qu'il devienne la chose la plus partagée de la société. Car c'est de cela dont il est question : permettre à chacun de prendre de la hauteur, de s'élever au dessus de sa propre condition pour
découvrir qu'elle n'est que celle d'une condition plus générale, celle de la classe exploitée dans toute sa diversité sociologique. S'élever par le partage, par la solidarité, par la démocratie,
par la connaissance.
Si M. Sarkozy est au pouvoir ce n'est pas tant parcequ'il aurait convaincu le peuple des "vertus du capitalisme", c'est parce que la plupart des dirigeants de gauche n'ont pas
voulu construire avec le peuple des réponses transformatrices et que pour la plupart 'ils ont adopté les thèses du libéralisme.
Le mouvement de la société peut produire une gauche radicalement nouvelle qui redonnera espoir dans l'action autonome des gens pour transformer la société. Nous vivons une époque qui va nous
surprendre par bien des événements singuliers. La gauche est morte, vive la gauche !