Je vais avec Sebastian, mon beau-père qui est vénézuélien, visiter le Caracas historique dont l’architecture tranche avec les gratte-ciels de verre et d’acier des
grandes sociétés ou encore avec les édifices aux facades qui n’ont jamais été terminées. Ici, les monuments sont de style colonial comme l’assemblée nationale toute blanche et crème qui jouxte le
conseil municipal de la ville. Celui-ci est ouvert au public pour une exposition en son jardin intérieur sur l’histoire de Caracas avec des vues des différentes époques. En face se trouve la place
du héros national, Simon Bolivar dont la statue domine l’endroit, agréable espace où les gens aiment venir se reposer á l’ombre des arbres. Non loin, le parti de Chàvez, le PSUV, y a installé une
tente où les militants sous les drapeaux rouges de leur organisation remettent leur presse aux passants et vendent des CD de chants révolutionnaires. De l’autre côté de la place se trouve la
cathédrale. On y donne une messe. Une messe spéciale. En effet, ce sont les employés de la SENIAT, la société publique chargée de la collecte des impòts qui célèbrent ses 14 ans d’existence. Je
m’étonne de cette pratique habitué que je suis à la séparation laïque entre l’église et l’Etat, mais ici cela ne choque personne dans ce pays où le christianisme imprègne toute la société.
D’ailleurs il n’est pas rare de voir dans les rues, les peintures murales des partis politiques pro-chavistes ou de l’opposition qui font référence au Christ. Ainsi en est-il de fresques où se
retrouvent côte à côte les portraits de , Jésus, Marx, Bolivar et Chàvez comme pour marquer une continuité historique.
Nous nous rendons ensuite dans la maison de Simon Bolivar. Grande maison de la bourgeoisie coloniale avec son patio intérieur, c’est un lieu vénéré par les habitants où est retracée sur des
tableaux dans chaque pièce la vie du "libertador", celui qui a su fédérer les forces indépendantistes pour libérer plusieurs nations d´Amérique latine de l’oppression espagnole. Bolivar est ici la
figure fondatrice de la Nation et de la Liberté, chaque organisation politique de gauche comme de droite se réclame de son héritage, chaque citoyen porte pour Bolivar une immense gratitude. Le soir
après être passés devant le palais présidentiel fortement gardés par les militaires nous nous promenons dans les rues où marche une immense foule pressée de prendre le bus ou le métro pour rentrer
en banlieue. L’air est étouffant et pollué par les gaz déchappement d’une file discontinue d’autobus, de véhicules qui ne laissent jamais la priorité aux piétons, du 4x4 dernier modèle des plus
aisés à la vieille américaine toute rouillée et cabossée des plus modestes. Nous descendons l’escalier du métro, là encore la foule s’y presse, plus importante encore qu`à Paris aux heures de
pointe. Mais ici les gens curieusement, alors que les rues sont plutôt sales, maintiennent leur métro dans un état impeccable, pas un papier, pas un graffiti. Et ce qui ne gâche rien , même si il y
a l’air conditionné, rappelons que les vénézuéliens, surtout les vénézuéliennes sont coquets, les gens ici connaissent mieux l’usage du savon et du déodorant que les européens et, question de
dignité prennent énormément soin de leur personne.
Ainsi ai-je vu dans ce pays, dans les villages les plus reculés et les plus pauvres, des jeunes gens toujours vêtus très proprement et en permanence pendus sur des fils entre deux masures de
terre battues, les derniers linges séchant comme les drapeaux de la fierté au soleil tropical.